Extrait de: “petites pensées de formes” (2009)

La ville manque de ravins.

Le ravin de l’Oiseau est idéal pour cela: chahut minéral, désordre parfait. C’est l’endroit des paroxysmes. On s’habituait juste à un cadavre que déjà un orage le remplace par une ride de cailloux mâchés par l’érosion, ou par un creux d’eau, ou par une marne délitée, ou par quelque chose qui n’a pas de nom encore, car c’est l’endroit d’un commencement de tout.

J’ai un peu menti: ces pensées ne sont pas celles du ravin mais les miennes. Retrouvées une à une dans ce fatras de fragments — il doit y avoir les vôtres aussi — et plus faciles à voir que dans moi-même, où tout est déjà trop rangé, arrangé surtout.

Il y en a sûrement encore enfouies qui me feront revenir aprés la prochaine avalanche, mais déjà la ribambelle me livre les métaformes et des textures qui inspirent mes caresses et dirigent mes gestes depuis si longtemps.

J’agite les bras pour vérifier si l’ombre de l’arbre n’est pas la mienne encore,

j’arrête de penser pour ne pas devenir le tumulte du torrent.

Les pensées du ravin

 

Série de 21 photographies N&B projetées

+ un grand format en accrochage

Ravin de l’Oiseau, Massif de la Grande Chartreuse

Automne 2010

 

 


Les pensées du ravin

Quel plaisir au cœur de l’hiver de fouiller dans les caisses du cellier, parmi les légumes qui dorment en attendant

le printemps. Quand les jours grandissent apparaissent peu à peu les indices

des beaux jours : germes des tubercules, feuilles albinos des carottes, radicelles des betteraves.

Et pendant que dehors il neige, les petits yeux jaunes des oignons quand on cuisine la soupe me rappelle les matins d’août lorsque je cours avec mon arrosoir avant d’aller empoussièrer l’atelier.

(2013) - Photo numérique

Le printemps dans l’hiver

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